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26 Mai 2023
L’affaire Guillaume Seznec, l’une des plus connues de France, célèbre ces cent ans ce jeudi. En un siècle, de nombreuses théories ont émergé pour expliquer la disparition de Pierre Quéméneur, dont le corps n’a jamais été retrouvé.
La tombe de Guillaume Seznec, à Plomodiern, en Bretagne. AFP / Fred TANNEAU
Article de Pierre Hardy
C’était il y a tout juste cent ans. Le 25 mai 1923 disparaissait Pierre Quéméneur, un riche homme d’affaires, alors qu’il se rendait à Paris avec Guillaume Seznec. Les deux associés bretons voyagent à bord de la Cadillac fatiguée de Seznec, qui ne cesse de tomber en panne. Craignant d’être en retard, Quéméneur aurait décidé de finir le voyage en train. Seznec prétend ainsi l’avoir déposé dans une gare avant de faire demi-tour. Et assure n’avoir jamais revu Quéméneur, dont la trace se perd ici.
Dernière personne à l’avoir vu vivant, Seznec est vite soupçonné. Il est condamné au bagne en 1924, au terme d’un procès retentissant qui conclut à sa culpabilité dans le meurtre de Pierre Quéméneur. Malgré 14 demandes en révision du procès, toutes rejetées, l’innocence de Guillaume Seznec - qu’il a toujours clamée - n’a jamais été prouvée. Cent ans plus tard, alors que le corps de Quéméneur n’a jamais été retrouvé, l’ « affaire » reste entourée de mystère et continue à alimenter les théories. Petit tour d’horizon.
La culpabilité de Seznec
Pour la justice, Seznec avait tout du coupable idéal. Décrit comme un type malin et magouilleur, il était criblé de dettes. Pendant l’instruction, il ne cesse de se contredire et son récit ne colle pas : Seznec affirme par exemple avoir déposé Quéméneur à la gare de Dreux, en Eure-et-Loir, le soir de sa disparition. Il sera démontré que les deux hommes ont en fait dîné à Houdan, 20 km plus loin sur la route de Paris, à une heure où plus aucun train ne circulait.
Un élément, surtout, va précipiter sa chute : une machine à écrire, retrouvée dans le grenier de sa scierie, et qui aurait servi à rédiger une promesse de vente d’une propriété appartenant à Quéméneur, au bénéfice de Seznec, pour une somme modique. Jugée quasi indiscutable au moment de l’affaire, la thèse de la culpabilité de Seznec a petit à petit été remise en question, à mesure que de nouveaux éléments ont émergé.
La piste des bandits américains
Selon la version de Seznec, Quéméneur se rendait à Paris pour un obscur trafic de Cadillac à destination de l’Union soviétique. Il y avait rendez-vous avec un américain du nom de « Cherdly » ou « Chardly » pour faire affaire.
« L’impression très nette qui se dégage de ces faits est que M. Quéméneur a été attiré dans un guet-apens et que la police se trouve à présent en face de malfaiteurs habiles et redoutables », écrit la Dépêche de Brest du 26 juin 1923, dans un article rapporté sur son blog par la journaliste et spécialiste de l’affaire Liliane Langellier. « Des constatations faites au cours d’enquêtes menées afin d’éclaircir maintes affaires, on a déjà établi qu’il existait en France une bande organisée de bandits internationaux comptant surtout parmi ses membres des Américains ; faut-il admettre que notre compatriote en a été la victime ? », se demande le journal. En 1924, un acte d’accusation affirmera n’avoir trouvé aucune trace de ce mystérieux personnage, « une pure création de l’imagination de Seznec ».
Quéméneur tué à Plourivo
Les coups de feu entendus aux abords de la propriété de Quéméneur à Plourivo, un soir de la fin mai 1923, pourraient-ils être la cause de sa mort ? C’est la piste creusée par un juge de Pontrieux, Charles Victor Hervé, s’appuyant sur le témoignage de marins qui draguaient en face de la maison. En 1949, une commission de révision avait toutefois établi que ces coups de feu avaient été tirés lors d’une noce le 24 mai 1923, alors que Pierre Quéméneur se trouvait à Rennes, rappelle Ouest-France.
La « machination » policière
La thèse d’une « machination policière » visant à faire condamner Guillaume Seznec a été défendue avec acharnement par des membres de la famille du bagnard, dont son petit-fils, Denis Seznec, auteur du best-seller « Nous, les Seznec » en 1999.
Un personnage trouble est notamment pointé du doigt : Pierre Bonny. Flic ripou dont le nom apparaîtra aussi dans la célèbre affaire Stavisky, et qui finira fusillé après avoir été l’un des responsables de la Gestapo française au cours de la Seconde Guerre mondiale, Bonny n’est qu’un jeune stagiaire de police quand éclate l’affaire. Il joue un rôle mineur dans l’enquête, mais son nom - désormais entaché d’une réputation sulfureuse - ressurgit après-guerre. Bonny est alors présenté comme le cerveau d’un complot, et est notamment accusé d’avoir déposé la machine à écrire dans le grenier de la scierie de Seznec. « Pourquoi aurais-je eu besoin d’organiser cette mise en scène ? C’est absurde et cela ne tient pas debout », se serait-il lui-même défendu selon des propos rapportés par l’écrivain Michel Kerriel dans son livre « Seznec, l’impossible réhabilitation ».
Le secret de famille
En 2015, près de 100 ans après les faits, de nouveaux éléments relancent complètement l’intérêt pour cette affaire. Dans un livre, l’ancien avocat de la famille Seznec Denis Langlois rapporte les confidences que lui aurait faites « Petit-Guillaume », l’un des fils du bagnard : alors qu’il joue dans le jardin de la propriété familiale, le 27 mai 1923, « Petit-Guillaume » entend sa mère crier à l’intérieur. Se hissant à la fenêtre, il voit le corps d’un homme étendu au sol. C’est Pierre Quémeneur. L’homme d’affaires aurait tenté d’agresser Marie-Jeanne Seznec, qui l’aurait violemment repoussé, entraînant sa mort. Absent au moment des faits, Guillaume Seznec aurait dissimulé le corps et fait promettre à sa famille de ne jamais rien divulguer de cette histoire.
Affaire Seznec : machination policière, secret de famille... cent ans de pistes inabouties
L'affaire Guillaume Seznec, l'une des plus connues de France, célèbre ces cent ans ce jeudi. En un siècle, de nombreuses théories ont émergé pour expliquer la disparition de Pierre Quéméneu...
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