Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Affaire Seznec Investigation

Le blog de Liliane Langellier. Premier blog sur l'affaire Seznec. Plus de 1.400 articles.

Affaire Seznec. Marie-Jeanne, la haine en bandoulière...

La haine peut servir de moteur pendant un certain temps - pas davantage. Elle peut te donner une force un peu illusoire, mais elle reste toujours en premier lieu un parasite qui te dévore.
Les Chaussures italiennes (2009) de Henning Mankell

"On annonce la mort à l'hôpital Beaujon de Mme Seznec, la femme de l'assassin de Quémeneur, condamné aux travaux forcés à perpétuité. De l'assassin, oui, car malgré une campagne faite pour obtenir la révision de ce procès, on ne peut mettre en doute la culpabilité du condamné. Jamais accusé n'a eu contre lui autant de charges : ses mensonges, les faux qu'il a commis, sa présence en des endroits où il ne devait pas être, les moyens qu'il a employés pour faire croire à l'existence de Quémeneur alors qu'il était disparu, la valise de Quémeneur tâchée de sang, le sang découvert sur le collet de Seznec, et bien d'autres charges encore.

Quelqu'un pourtant ne mettait point son innocence en doute, et ceci est bien touchant, c'était sa femme, Mme Seznec. Et depuis la condamnation de son mari elle a consacré sa vie et ses pauvres économies à essayer d'obtenir la révision de ce procès. Peut-être même l'exploitait-on et était-elle dupe ? Tout est possible."  

Georges Claretie. L'Ami du Peuple du dimanche 17 mai 1931.

 

Juillet 1906 / mai 1923 : Marie-Jeanne subit...

Mai 1923 / mai 1934 : Marie-Jeanne agit ..

Dès 1921, Marie-Jeanne a compris que c'était foutu.

Que l'abîme s'ouvrait sous ses pieds.

Plus de comptabilité à la scierie, des bagnoles en pièces détachées ou inutilisables en vrac dans la cour de l'usine, un mari qui, quand il ne dort pas (c'est fou le nombre de fois où, à l'arrivée des visiteurs, il a fallu réveiller Seznec...) est parti sur les routes pour courir après des affaires chimériques...

C'est elle qui, depuis des années, assure les courriers commerciaux de Guillaume Seznec...

Alors ..

Quand son grand benêt de mari rentre à la scierie au tout petit matin du lundi 28 mai 1923...

Qu'il lui pleure dans les bras en lui racontant qu'il a occis Pierre Quémeneur au cours d'une colère...

Marie-Jeanne prend les rênes de l'attelage.

C'est enfin sa revanche...

Celle sur une mère trop présente.

En bonne fille de commerçants (elle a sillonné les marchés jadis avec son père), elle élabore un stratagème.

Elle établit un scénario dont elle ne départira pas, jusqu'à sa mort...

Les Seznec ont quelques dollars or qu'elle a achetés par prudence.

Non, les Ricains ne payaient pas leur blanchisserie en or...

C'est quoi cette fable ???

Ne pas oublier que les Seznec n'étaient pas les seuls à blanchir le linge des Ricains :

« Règne soudain une incroyable prospérité. Les femmes lavent le linge des officiers qui paient bien. Elles livrent les chemises dans de grandes feuilles de papier blanc fournies par l’administration du camp. » in Azraelle 29.

A partir de ces quelques dollars or...

Marie-Jeanne Seznec va élaborer un scénario qu'elle fera apprendre par cœur à son grand benêt de mari.

12 novembre 1917 / 13 septembre 1919 : les Seznec n'ont pas eu deux ans pour accumuler leurs soi-disant dollars or.

D'après eux, une somme de 4.040 dollars en pièces d'or équivalent à 65.000 francs de 1923.

Juste, comme par hasard, la somme nécessaire à ajouter aux 35.000 francs de la promesse de vente et arriver ainsi à 100.000 francs, la valeur de Traou-Nez.

Comment avec un chiffre d'affaires de 90.000 francs (cf Seznek La cassette des dollars or : oubliée à la terrasse, chez Lombard... ) les Seznec ont-ils pu mettre de côté 65.000 francs ???

La fable des dollars or, c'est fait.

Restent encore pour Marie-Jeanne à rassurer la famille Quémeneur en leur faisant croire que leur parent est parti du Havre pour l'Amérique.

D'où l'invraisemblable scénario des 13 et 20 juin 1923.

Je suis également certaine que c'est elle qui a expédié ce nigaud de Seznec à Paris le 2 juin.

Elle a trouvé une petite annonce de l'avocat Gautier dans la presse locale...

Quoi de mieux que de justifier un aller à Paris par un rendez-vous d'avocat.

Cela permettra à Guillaume Seznec d'aller à la poste du boulevard Malesherbes tenter de récupérer le chèque du notaire Pouliquen.

C'est encore elle qui joindra (avec l'aide de Petitcolas) le futur témoin Le Her...

Elle qui enverra le chauffeur Samson enquêter au Café de la Marthe à Paris...

Elle encore qui s'activera sur la piste de Lormaye...

Elle, toujours elle !

Un détail ne m'a pas échappé...

C'est la façon arrogante dont Marie-Jeanne se tient face aux magistrats lors du procès.

 

"Sa déposition fut particulièrement violente. Elle s'avança, vit une chaise devant elle et délibérément y posa un genoux, s'accouda du bras gauche, tendit l'index vers la Cour et s'écria : 

- C'est du vandalisme qu'on a fait chez moi, du vandalisme pendant les perquisitions. Un pillage. On a osé perquisitionner partout, jusque dans les cabinets. On n'avait pas le droit.

Et, à chaque question que lui posait le président, elle se fâchait, devenait rageuse.

- On a trouvé chez Seznec une machine à écrire ?

- Ce sont les policiers qui ont dit ça. 

- Votre mari est-il allé au Havre ?

- Il me l'aurait dit.

- Mais des témoins l'y ont vu, continuait le président.

- Oh ! des témoins m'ont bien insultée hier au Palais.

Toutes les démarches qu'elle aurait faites à l'instigation de son mari pour trouver de faux témoins, elle les niait farouchement, et lorsqu'on lui parla de la lettre saisie, elle répliqua :

- Il est bien dommage que je ne l'ai pas reçue, car je l'aurais brûlée.

Hargneuse, essayant de noyer les questions sous un flot de paroles, elle continuait son réquisitoire contre la police, les juges, les témoins, la famille Quémeneur, contre tout le monde.

Et malgré tout, on éprouvait une grande pitié pour cette femme ardente, aux traits durs, à la voix sèche et colère, qui voulait à tout prix sauver son mari de l'échafaud ou du bagne.

Jusqu'à sa mort, elle a cru à son innocence. Tant mieux pour elle, et c'est ce qui la rend sympathique et douloureuse, comme toutes celles qui pleurent un être cher.

Hélas ! sa conviction était une erreur. L'affaire Seznec n'est pas une erreur judiciaire. Certes, on n'a pas retrouvé le cadavre, mais dans l'affaire Landru, il en manquait onze. Il y a bien des erreurs judiciaires, mais moins qu'on le croit, et qu'on le dit." 

Georges Claretie. L'Ami du Peuple du dimanche 17 mai 1931.

 

Voilà.

C'est mon opinion.

Relisez ses différentes déclarations aux journalistes...

Revoyez ses tentatives de révision du procès Seznec...

C'est Marie-Jeanne l'âme de tout ce fatras de contre-vérités.

Elle commande.

Elle a définitivement pris le pouvoir dans la nuit du 27 au 28 mai 1923...

Guillaume Seznec, empêtré dans sa faute, obéit.

 

 

Liliane Langellier 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article