Le blog de Liliane Langellier. Premier blog sur l'affaire Seznec. Plus de 1.400 articles.
4 Mai 2025
“La haine, c'est la vengeance du poltron.”
George Bernard Shaw / Major Barbara
"Plus gravement, (en 1988), devant 650 personnes, Denis Seznec accuse le beau-frère de Quemeneur, Me Pouliquen, d'avoir réalisé les faux en le traitant publiquement de "salopard", ce qui, en-dehors de l'aspect diffamatoire du propos, lui attire la réplique d'un des neveux du notaire présent dans la salle : "Il n'y a pas de salopard dans ma famille. Ce qui n'est pas le cas pour vous. Dites-nous donc comment est mort votre père ?" Tout aussi étrangement, Denis Le Her-Seznec réplique que sa mère s'est accusé d'un meurtre qu'elle n'avait pas commis et que les circonstances de la mort de son père demeurent obscures."
In Michel Pierre en page 222.
[NDLR le petit neveu qui a interpellé Denis Seznec, c'est en fait Jean-Luc Cardinal que l'on voit dans le documentaire de Pierre-François Lebrun (source familiale)]
Et oui, vous lisez bien, ce n'est pas nouveau que l'on salisse, dans l'affaire Seznec, le notaire Jean Pouliquen...
Et pourtant, rien dans sa vie, tant personnelle que professionnelle, ne se prête à cela...
C'était un homme de loi. Il était certainement scrupuleux (comme le prouve sa primo enquête) et un peu coincé mais certainement pas malhonnête.
Jean Pierre Pouliquen est né le 6 juin 1885 à Saint-Sauveur, canton de Sizun, département du Finistère.
La famille est originaire de Saint-Sauveur où les parents, Pierre Marie Pouliquen et Marie Perrine Ourlay, se sont mariés le 26 juin 1881.
Confirmé par Bernez Rouz en note 17 bas de page 18 :
"Jean Pouliquen né au village de Kéréon en Saint-Sauveur le 7 juin 1885 de Pierre-Marie Pouliquen et de Marie-Perrine Ourlay."
Registre Matricule Brest Classe 1905 N°41 (cf lien ci-dessous) :
20 ans en 1905...
Ajourné en 1906, classé dans le service auxiliaire en 1907 "faiblesse"...
Études de droit à Rennes de 1903 à 1907 (???) Ou...
En page 14, vous pourrez vérifier que tout le monde pouvait s'y inscrire : "Aucun grade, aucun titre universitaire n'est exigé. c'est l'Ecole professionnelle ouverte à tous. Toute personne peut donc se faire inscrire..."
En page 15 : " Les études durent deux ans. - L'enseignement de l'Ecole de Notariat nécessite, en effet, deux années d'études. Cette durée est indispensable pour épuiser le programme très complet de l'Ecole. Elle a, du reste, l'avantage de coïncider avec la durée des études du certificat de Capacité en Droit, par lequel beaucoup d'élèves de l'Ecole de Notariat voudront compléter leur éducation professionnelle, s'ils ne peuvent pas préparer leur licence en droit."
En page 18 : "Les étudiants doivent être inscrits dans une étude de notaire afin d'acquérir le maximum de connaissances nécessaires à l'exercice de la profession de notaire."
Pendant que Guillaume Seznec traficotait dans les stocks en tous genres, notre notaire Pouliquen, lui, s'est battu contre les Allemands.
Il était d'un niveau intellectuel nettement plus élevé que notre maître de scierie (d'où les jalousies en tous genres).
Il était gradé.
Il a même eu une citation : croix de guerre étoile de bronze.
Il s'est d'abord tapé deux années de service militaire de 1907 à 1909
Du 9 octobre 1907 au 25 septembre 1909.
Clerc de notaire en 1910 chez Me Cozic à Plounéour-Ménez.
Prestation de serment de Me Pouliquen le 11 février 1914.
En 1914, il est bien chez Me Manchec à Sizun, MAIS....
Il est mobilisé le 2 août 1914. D'abord en service auxiliaire, puis en service armé.
Il passe dans la réserve territoriale des armées du 15 octobre 1916 au 1er avril 1919.
N.B. Il est toutefois précisé que Jean Pouliquen a été classé service auxiliaire par décret du 26 septembre 1914 puis service armé par commission de réforme du 2 août 1915.
Donc, s'il est resté à Sizun, pendant le service auxilaire, le document de prestation de serment joint colle bien à l'histoire. Car, en bas du premier doc, il est écrit que l'ordonnance date du 8 février 1915.
Mais on peut lire (et ne vous en privez pas) :
"S'est distingué par son entrain et son mépris du danger au cours des combats de juillet et août 1918."
Donc, notre notaire est mobilisé du 2 août 1914 au 1er avril 1919.
Ceux qui ont lu "Au revoir là-haut" de Pierre Lemaître (Goncourt 2014) ont appris que les combattants ne furent pas démobilisés dès le 11 novembre 1918.
Notre notaire a donc un creux de presque 5 années dans sa carrière.
Ce qui est tout à son honneur, rendons-lui au moins ce qui lui appartient.
La Dépêche de Brest du 30 octobre 1919.
Jean Pouliquen était clerc en l'étude de Me Le Guyader-Desprées, à Châteaulin, ce dernier succédait à Me Le Lann, décédé brutalement en 1912 (à vérifier) -
L'Ouest-Éclair, 16 nov. 1913
M. Le Guyader venait de Pont-L'Abbé où il était clerc principal en l'étude de Me Gaouyer, étude reprise par Jean Pouliquen.
On étoffe le parcours de Pouliquen…
Il était déjà clerc à Plounéour-Ménez le 11 septembre 1910, témoin de naissance d'un neveu à Locmélar.
Pouliquen a été clerc au moins 10 ans (1910-1920).
Dans l'acte de mariage de sa sœur à Locmélar le 29 novembre 1919, il est qualifié de notaire à Châteaulin mais c'est une erreur, il était clerc.
Bernez Rouz en page 18 :
"Le 20 janvier 1920, Marianne-Rose-Laurence Quéméner épouse Jean Pouliquen, né au village de Kéréon en Saint-Sauveur le 7 juin 1885 de Pierre-Marie Pouliquen et de Marie-Perrine Ourlay."
Il a 34 ans quand il épouse Marianne Quéméner en 1920, il était clerc de notaire .
Marianne, la petite dernière de la grande famille, elle, est née le 29 août 1886.
Et elle décèdera à Saint Thégonnec le 12 mai 1981.
La Dépêche de Brest du 22 juillet 1920.
La Dépêche de Brest du 29 juillet 1920.
Bernez Rouz écrit son livre en mars 2005 : "L'affaire Quéméneur Seznec, Enquête sur un mystère". Où j'ai pu lire dès la page 18 :
"En janvier 1920, le négociant de Saint-Sauveur marie sa jeune sœur à Jean Pouliquen. Celui-ci n'est que clerc de notaire à Châteaulin mais il envisage d'acheter une étude à Pont-l'Abbé. L'esprit de famille souffle très fort puisque Pierre Quéméneur consent un prêt de 100.000 francs à son beau-frère le 10 mai 1920. Un prêt à intérêt (5 %), où il était stipulé : "Je m'engage à lui rembourser à la première réquisition, moyennant avertissement préalable de trois mois". Il doit en outre 60.000 francs remboursables le 1er août 1925 avec un intérêt de 5 %. Mais pour pouvoir honorer cette somme, Pierre Quéméneur doit emprunter à son tour 30.000 francs à sa soeur Jenny, et la même somme à son frère Louis."
Recensement Pont-l'Abbé 1921
Recensement Pont-l'Abbé 1926
Jean Pouliquen a été nommé administrateur provisoire des biens de Quemeneur, le 26 juillet 1923..
Les enfants Pouliquen : Pierre et Henri in La Dépêche de Brest du 10 avril 1943.
Jean Pouliquen. Acte de décès. 5 avril 1943.
Jean Pouliquen meurt en 1943. Guillaume Seznec l'apprend en quittant le bagne par le médecin-capitaine Richard qui était de Pont-l'Abbé (cf Denis Langlois en page 327) :
"Savez-vous que le beau-frère de Quemeneur, le notaire Pouliquen, celui qui vous a chargé pendant tout le procès, est mort d'un cancer dans d'affreuses souffrances. La punition divine. Quant à ses deux fils, ils sont tuberculeux. Chaque fois qu'ils passent sur la place des Carmes, on chuchote derrière leur dos : "Voilà les fils de l'assassin de Quemeneur. Ceux qui se sont engraissés du malheur de Seznec !" Vous pensez bien qu'ils ne disent rien et baissent la tête."
La haine, toujours la haine, encore la haine qui pue encore aujourd'hui.
Oui, la haine et la honte pour ceux qui haïssent gratuitement.
Liliane Langellier
Recensement Pont-l'Abbé 1926.
Thierry Lefebvre...
Registre Matricule Brest Classe 1905 N°41 / Page 67..
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