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Affaire Seznec Investigation

Le blog de Liliane Langellier. Premier blog sur l'affaire Seznec. Plus de 1.400 articles.

Affaire Seznec. Mercredi 13 juin 1923. Lettre de Jean Pouliquen à la Sûreté Générale...

LETTRE DE JEAN POULIQUEN

Paris, le 13 juin 1923

Monsieur le Directeur de [la]
1 Sûreté Générale2
Paris

J'ai l'honneur de porter à votre connaissance les faits suivants  :

 Monsieur Pierre Quéméneur, mon beau-frère, négociant en bois, Conseiller Général du Finistère, demeurant à Landerneau, a quitté son domicile le jeudi 24 mai 1923  ; il a pris à Landerneau l'express de 8  h.  46 à destination de Paris  ; il s'est arrêté à Rennes, où il est arrivé à 12  h.  46. Là, il a été rejoint par M. Seznec, marchand de bois demeurant à Morlaix, qui avait fait le trajet de Morlaix-Rennes sur une automobile Cadillac qu'il pilotait lui-même. Ils ont tous deux passé la nuit à Rennes à l'Hôtel Parisien et sont repartis ensemble le lendemain vendredi 25 mai à 5 heures du matin pour Paris dans l'automobile de M. Seznec.

Par suite de pannes et crevaisons nombreuses, ils ne sont arrivés à Dreux qu'à 4 ou 5 heures de l'après-midi. Après avoir réparé la voiture au garage Hodey, 33, rue d'Orfeuil à Dreux, ils ont de nouveau repris la direction de Paris, mais la voiture ne leur donnant pas satisfaction, M. Quéméneur, qui avait un rendez-vous d'affaires à Paris pour le lendemain matin 8 heures et craignant de manquer le rendez-vous, faisait faire demi-tour à la voiture au bout de quelques kilomètres et revenait à la gare de Dreux, où M. Seznec prétend l'avoir quitté à la tombée de la nuit, c'est-à-dire vers 8 ou 9 heures du soir.

 Depuis cette époque, M. Quéméner3 ne nous a jamais donné de ses nouvelles et nul ne l'a vu. A-t-il pris à la gare de Dreux le dernier train se dirigeant sur Paris, c'est-à-dire celui de 21  h.  56 arrivant à la gare des Invalides à 23  h.  34  ? C'est probable.

 Mon beau-frère semble avoir correspondu avec un sujet américain habitant Paris et donnant comme adresse 6, boulevard Malesherbes. Il s'appelait Chardy ou Cherdy et employait dans ses correspondances du papier à lettre portant l'en-tête de la Chambre Américaine de Paris, 32, rue Taitbout. C'est avec cette personne que mon beau-frère devait avoir un rendez-vous le samedi 26 mai à 8 heures du matin  ; cette entrevue a-t-elle eu lieu comme il était convenu  ? Nul ne le sait.

Modèle de papier à lettres de La American Chamber of Commerce in Paris (1919)

Mon beau-frère semble avoir correspondu avec un autre sujet américain nommé Ackermann, habitant à Paris, 16, rue Popincourt.

 D'après enquête personnelle faite par moi l'adresse donnée par M. Chardy semble fausse et je n'ai pu le retrouver  ; quant à M. Ackermann il habite bien Paris à l'adresse indiquée, mais il prétend ne point connaître mon beau-frère et ne l'avoir jamais vu.

 Avant son départ pour Paris mon beau-frère m'avait prié de lui adresser à Paris Poste Restante n°  3 un chèque de soixante mille francs sur la Société Générale. Je lui ai adressé sous pli chargé ce chèque à l'adresse indiquée et d'après renseignements pris à la poste-même, ce chargement a bien été demandé dans la journée du 26 mai, alors qu'il n'était pas encore arrivé, n'ayant quitté Quimper [que]4 ce jour-même. Depuis le chargement n'a plus été réclamé et mon beau-frère qui semblait cependant en avoir un besoin urgent pour traiter son affaire n'est plus revenu à la poste restante où le chargement est toujours en instance.

Dans ces conditions, étant donné la conduite toujours régulière menée par mon beau-frère et son éloignement de tout amusement futile je suis amené à formuler les présomptions les plus funestes. Un accident n'est même pas admissible car il portait sur lui toutes les pièces nécessaires pour l'établissement de son identité et nous en aurions été prévenus.

 Ceci expliqué, je vous serais reconnaissant, Monsieur le Directeur, de vouloir bien prescrire d'urgence toutes les recherches nécessaires pour éclaircir cette affaire.

Jean Pouliquen, notaire à Pont-l'Abbé
Finistère
5

___
1. Mot omis.
2. Louis Marlier, directeur de la Sûreté générale du 1er mars 1923 au 8 juillet 1924.
3. Rare occurrence de la graphie «  Quéméner  » chez Jean Pouliquen.
4. Mot omis.
5. Denis Langlois, «  L’Affaire Seznec 1 (1923-1924)  ».

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