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Affaire Seznec Investigation

Le blog de Liliane Langellier. Premier blog sur l'affaire Seznec. Plus de 1.300 articles.

Affaire Seznec. Stocks américains. Emmanuel Brousse et le scandale Kermina...

Le plus dur pour les hommes politiques, c'est de se souvenir de tout ce qu'il ne faut pas dire.
Coluche

"Le Pillage des stocks américains

La Chambre syndicale des employés dénonce les scandaleux contrat Brousse-Kermina

M. Emmanuel Brousse, sous-secrétaire d'Etat aux finances, rayon des économies, a confié la liquidation des stocks américains à la firme Kermina avec des conditions désastreuses et pour l'Etat et pour les consommateurs.

La Chambre syndicale des employés élève une vigoureuse protestation contre ce scandale en exposant ce qu'est le contrat Kermina :

Encore une fois, l'Etat français montre son incapacité à gérer le bien public.

La liquidation des stocks américains pouvait être une source de profits pour la nation.

Pour quelles raisons l'Etat, qui en avait commencé l'exploitation, préfère-t-il tout d'un coup abandonner ses droits aux spéculateurs ?

M. Emmanuel Brousse, sous-secrétaire d'Etat aux finances, vient en effet d'accorder à MM. Kermina et consorts l'exploitation des produits et marchandises stockés au camp d'Aubervilliers.

Dans quelles conditions ?

Sans bourse déliée : MM. Kermina n'ayant simplement qu'à déposer dans une banque un cautionnement d'un million dont les intérêts resteront leur propriété. 

Sans risques : MM. Kermina ayant le droit de choisir les marchandises qu'ils jugeront les plus vendables et de rendre celles qu'ils n'auront pas vendues.

Des bénéfices considérables assurés : il est consenti à MM. Kermina et consorts de majorer de 25 % toutes les marchandises qu'ils voudront bien se faire débiter.

La part de l'Etat

L'Etat consent cependant à conserver une petite part sur cette majoration.

Sur cette première tranche de majoration de 25 millions, l'Etat prélèvera 5 millions, alors que MM. Kermina et consorts auront 20 millions.

Sur la tranche suivante, la part de l'Etat et celle de MM. Kermina seront de moitié chacune.

Et l'Etat pousse la sollicitude jusqu'à permettre à ces Messieurs de ne faire de versements au Trésor que tous les dix jours, déduction faite de 25 % de majoration dont la part revenant à l'Etat n'est réglée que tous les trois mois.

C'est-à-dire que les recettes produiront intérêt d'au moins 6 % pendant dix jours. Il est à remarquer que la part sur les bénéfices revenant à l'Etat leur produira intérêt pendant trois mois.

L'Etat s'engage, en outre, à faciliter la livraison et l'enlèvement des marchandises des camps, la fourniture des wagons, ainsi que celle des baraquements nécessaires à l'exploitation.

M. Brousse fauteur de vie chère

On ne peut avouer d'une façon plus précise ou sa trop grande sollicitude ou son incapacité de gestion.

Tous les avantages sont du côté de Kermina, dont le premier geste a été de remercier trois cents employés qui vraisemblablement étaient considérés par lui comme des gêneurs, des empêcheurs de tourner en rond.

M. Kermina veut avoir les coudées franches.

C'est pourquoi, d'ailleurs, le contrôle qui existait à Aubervilliers sur la sortie des marchandises est maintenant à peu près inexistant.

Les six milliards de stocks américains vont-ils être dilapidés ?

Quand les Américains nous cédèrent leurs stocks, ils posèrent comme condition qu'ils devaient servir à combattre le mercantilisme.

Allons-nous assister à ce spectacle invraisemblable du pillage des stocks américains par ceux justement dont leur répartition devait arrêter les appétits toujours croissants ?

M. Emmanuel Brousse, en abandonnant la liquidation de six milliards de stocks à la firme Kermina a desservi l'intérêt général et contribué à faire hausser le coût de la vie.

La liquidation des stocks américains va-t-elle devenir un scandale aussi retentissant que celui de la liquidation des biens des congrégations ?

La Chambre syndicale des employés soucieuse des intérêts des consommateurs comme des garanties du personnel, se devait à elle-même de protester énergiquement contre un tel contrat.

Elle fait appel à l'opinion publique :

Pour réclamer son annulation ;

Pour obtenir des garanties pour le personnel ; 

Pour demander à participer au contrôle de la liquidation des stocks."

 

 

in Le Populaire du 1er Juillet 1920

............................................

 

"Le reporter est entré dans le cabinet du grand liquidateur des stocks en disant :

- Monsieur le ministre, vous êtes l'objet de certaines attaques...

Et M. Brousse a, paraît-il répondu : "Je m'en réjouis."

Il est possible que M. Brousse se réjouisse de mes attaques. Mais sa gaîté s'exprime de façon bien singulière. L'allégresse de M. Brousse n'est que fureur et grincements de dents. Pour la joie de traiter ses adversaires de chiens, il se compare lui-même à une caravane. Cela fait à M. Brousse un bien grand nombre de bosses. Quel dommage qu'il lui manque en définitive la seule utile en l'occurrence : la bosse de l'organisation.

J'ai cherché tout au long de 250 lignes un tout petit bout de réponse aux questions très précises que je lui pose depuis le 18 mai. Rien. Je n'ai rien trouvé qui ressemble de près ou de loin aux explications que je réclame au nom de l'intérêt public.

Le caravanesque et broussailleux liquidateur énumère, non sans humour, les denrées et marchandises que l'Etat cède par ses soins à MM. Kermina. Il s'étend, avec une complaisance presque suspecte, sur la pagaïe des camps, sur la nécessité de liquider rapidement, etc... Tout cela, nous le savions. Nous l'avons dit ; ce n'est plus la question.

De même, lorsqu'il parle de la commission de contrôle, M. Brousse tombe volontairement dans la confusion que j'avais d'avance prévue et dénoncée. Il s'abrite derrière la "commission présidée par un des membres les plus éminents du Conseil d'Etat et composée de juristes, de notabilités commerciales, de membres de la Cour des comptes."

 

 

La commission qui nous intéresse, nous, n'est pas celle qui dépend du ministre intéressé : c'est l'autre, c'est la commission parlementaire, celle que préside MM. Milliès-Lacroix. M. Brousse n'en souffle mot.

Et pas davantage il ne souffle mot du contrat Kermina. Nous avons demandé s'il était vrai :

 1° Que le ministre avait cédé à MM. Kermina, sans adjudication, le droit de liquider, moyennant une hausse de 25 % sur les prix du catalogue, les stocks d'Aubervilliers ? 2° Que les sieurs Kermina eussent obtenu le droit de choisir dans les stocks d'Aubervilliers les marchandises à leur convenance, laissant à l'Etat le rebut de ce choix ? 3° Que le contrat en question pût être étendu à tous les stocks américains ?

M. Brousse avait, hier, deux colonnes à sa disposition pour nous répondre sur ces points très définis.

Il ne l'a pas fait.

Il s'est borné à nous faire savoir que M. Kermina "a eu un fils, chevalier de la Légion d'honneur, tué pendant la guerre et un autre mutilé". Cela, certes fait honneur à la famille Kermina. Mais cela n'a aucun rapport avec les stocks d'Aubervilliers. Sont-ce là les derniers arguments d'un ministre aux abois ? Faisons-nous état, pour attaquer M. Brousse (ou même pour répondre à ses injures), de nos décorations ou de notre passé militaire ? Nous le pourrions tous à Bonsoir, qui est, M. Brousse le sait bien, un journal d'anciens combattants où les croix de guerre ne sont pas rares. Cela n'est pas notre procès.

Il ne s'agit pas de M. Kermina, encore moins de ses fils. Il doit être encore une fois bien entendu que nous ne reprochons rien, ici, à M. Kermina. C'est un commerçant, qui fait son métier de commerçant. Il a, sur son chemin, trouvé un ministre ingénu. Qui donc le blâmerait d'en avoir profité ?

Quant à nous, nous pensons que l'ingénuité n'est pas une vertu ministérielle. Quan bien même l'ingénu serait, comme celui de Voltaire, un Huron - et qu'il vînt des brousses américaines pour liquider les stocks américains."

Henri Béraud in Bonsoir du 27 mai 1920.

 

Henri Béraud

Le Petit Bleu de Paris du 22 avril 1920

L'Intransigeant du 8 mai 1920 :

"Il s'agit de faire gagner à la tribu Kermina quelques bonnes dizaines de millions."

Le Petit Bleu de Paris du 19 mai 1920

Bonsoir du 21 mai 1920

L'Humanité du 30 mai 1920 avec les articles du contrat...

Le Ruy Blas du 25 novembre 1920

Joseph Kermina...

Né le 10 décembre 1858 dans le Loiret à Saint-Jean-le-Blanc.

Mort assassiné par un Serbe le 11 septembre 1921.

Excelsior du 10 septembre 1921

L'Echo d'Alger du 11 septembre 1921

Kermina tient ses bureaux au 66 boulevard de Clichy, Paris 18e...

Et dans les baraques des stations Métro : Barbès, La Chapelle, Sèvres-Lecourbe, La Glacière, Nationale.

L'Ouest-Eclair du 16 août 1920 : Camions, Camionnettes, Limousines, conduites intérieurs, Torpédos.

L'Ere Nouvelle du 27 novembre 1920

L'Ouest-Eclair du 27 février 1921

Le Petit Journal du 17 octobre 1921

4 Square Alboni, Paris 16e, pas loin de chez Charles Marc, 36, rue de Longchamp.

Mais il vend aussi au Mans :

L'Ouest-Eclair du 6 novembre 1921

J'en connais un qui habitait Clichy à cette période :

Pierre Marc. 

Clichy n'est guère loin d'Aubervilliers.

Et Guillaume Seznec allait souvent le voir à Paris.

Pour acheter aux stocks.

Bernez Rouz écrit en pages 48/49 :

"L'implication de Pierre Marc, le beau-frère de Seznec est aussi particulièrement intéressante. D'abord parce qu'il est mécanicien à Clichy, il connaît donc le marché automobile et les opportunités qu'offrent la vente des stocks américains."

Sans oublier Charles Marc, l'autre beau-frère.

Qui habite non loin de la Porte Dauphine en 1923 (rue de Longchamp).

Charles. Charly. Charley.

In Bernez Rouz en page 157 :

[Dès juillet, le juge Campion reçoit une lettre] :

"Le fameux Charly qui correspondait avec M. Quémeneur par l'intermédiaire de Seznec s'appellerait peut-être de son vrai nom Charles Marc, frère de Mme Seznec. A Plomodiern, son pays d'origine, il n'était guère connu que sous le nom de "Charlic" ou "Charli". Actuellement il demeure à Paris où il s'occupe d'autos, m'a-t-on dit. Ne serait-ce pas lui qui se serait chargé d'envoyer au Havre la valise de M. Quémeneur ?"

"Or, le beau-frère en question serait impliqué dans le trafic d'automobiles, en effet, on le retrouve en 1920 au côté de Seznec au parc auto de Paris. Pourtant personne ne lui demandera des explications sur ses activités."

Et puis...

Qui trouve-t-on comme avocat dans l'affaire Kermina ?

Me de Moro-Giafferi, of course.

Défenseur de Kermina.

L'avocat était donc au fait des histoires de stocks.

Un an plus tard, il conseillera vivement à Guillaume Seznec de ne pas évoquer les stocks américains pour sa défense.

On comprend mieux pourquoi.

L'Oeuvre du 15 octobre 1922

La famille Kermina :

Le Temps du 13 septembre 1921

Les Taxis-Autos des Kermina Frères

Kermina loueur de taxis-autos

L'Argus du 19 novembre 1933.

 

La Kermina Compagnie, ce sont les G2.

Qui ont participé, début novembre 1914, aux célèbres Taxis de la Marne.

Au retour, on fit le relevé des compteurs ( car les taxis avaient roulé au compteur ) : il en coûta 70 102 francs au Trésor Public - soit 0,030ct €/ Km parcouru et conformément à la répartition en vigueur les chauffeurs touchèrent 27 % de la somme indiquée au cadran, tarif n° 2 pour chargement au-dessus de 3 personnes.

 "Le commandement avait également obligé les trois compagnies de taxis (Générale des voitures, Automobiles de place et Kermina-Métropole) à organiser une réserve permanente de 150 taxis-autos disponibles à tout moment." in Le Monde du 3 septembre 1989.

 

Il s'agit ici d'un taxi Renault vivaquatre KZ11 de la compagnie G2 Métropole appartenant à Monsieur Kermina. Sauf erreur de ma part sur la date la compagnie Kermina-Métropole disparut en 1955. La famille à la mort de Monsieur Kermina devint propriétaire du garage Métropole-Lamarck rachetée il y a 10 ou 15 ans de cela par le groupe Neubauer.

............................................

Denis Seznec en page 447 : 

"Le 24 juillet 1981, Me Langlois écrit une lettre au nouveau garde des Sceaux, Robert Badinter, dans laquelle il s'interrogeait sur les raisons qui avaient retardé la saisie de la commission.

[...]

Faut-il croire aussi qu'en haut lieu on craint que les émissions et leurs suites ne fassent apparaître que la famille d'un haut dignitaire de l'Etat avait tiré sa fortune du trafic des surplus de la guerre 1914-1918, noeud véritable de l'affaire Seznec ?"

Je n'oublie pas non plus l'histoire de la rapide fortune d'un propriétaire de taxis parisiens.

Serait-ce Emmanuel Brousse le sous-secrétaire d'Etat aux stocks américains qui a mangé dans la gamelle ????

Joseph Kermina serait-il le patron de cette entreprise de taxis qui a fait fortune au moment des stocks américains ???

Je pose question.

 

Liliane Langellier

P.S. Tout cela me rappelle ma première B.D. 

"Les aventures de Rosalie" de Jean Calvo (1946)...

Un hasard ???

Je ne crois pas.

 

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