Le blog de Liliane Langellier. Premier blog sur l'affaire Seznec. Plus de 1.400 articles.
21 Mars 2025
Une personne est une ombre où nous ne pouvons jamais pénétrer, une ombre où nous pouvons tour à tour imaginer, avec autant de vraisemblance, que brillent la haine et l'amour.
Marcel Proust.
"Le dossier n'apporte aucun scénario crédible car toutes les possibilités ont été vérifiées sans succès. Nous devons nous résoudre à l'idée que si Seznec a tué, ce n'était pas dans la nuit du 25 mai."
Ça c'est de l'argument !
En fait non... juste de l'interprétation, même pas sérieuse.
La Petite Gironde 30 octobre 1924
"La défense reproche au témoin de ne pas avoir signalé à la justice la première déclaration de M. Le Her lorsque celui-ci est venu déclarer à la Sûreté Générale qu'il avait rencontré M. Quémeneur sur un tramway.
Le témoin : C'est que la déclaration de M. Le Her était sans intérêt puisqu'il ne pouvait affirmer que la rencontre fût postérieure à la disparition.
L'avocat général : Dans les premiers temps où il a produit son témoignage, M. Le Her n'a pu fixer même la semaine dans laquelle se serait placée la rencontre.
Les incertitudes et les hésitations du témoin Le Her sont confirmées par l'inspecteur Mathey.
M. Mathey ajoute qu'il a pris des renseignements sur M. Le Her. " Ces renseignements, dit-il, ne sont pas défavorables, mais ils ne sont pas, comment dirais-je, très favorables." (Mouvement).
A ce moment Me Alizon, au nom de la partie civile, demande à poser une question.
"Pourquoi, dit-il, depuis cette déposition, M. Le Her, qui a un loyer modeste à Paris, a-t-il pu venir à Quimper avec des habits soignés et en motocyclette ?" ( Rires)
Me Marcel Kahn : Quant aux habits, cela prouve que M. Le Her est soigneux.
- Et la motocyclette ? interrompt Me Alizon.
- Je retiens la suspicion qu'on cherche à faire planer sur les témoins favorables à la défense, reprend Me Marcel Kahn, et je m'expliquerai sur ce discrédit systématique.
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Revenons à notre François Le Her...
François Le Her naît à Kergleuchard (Ploudalmézeau) le 22 juillet 1892.
Il est l'aîné de 16 enfants...
Kergleuchard au recensement 1911
Famille Le Her sur Geneanet.
Il s'engage dans l'armée en 1910.
Il a alors 18 ans.
1892 / 1910 = Il habite Kergleuchard.
14 mai 1910 : Engagement volontaire dans la Marine.
1910 / 1917 = Marine française.
De juin 1911 à décembre 1913, il est sur le d'Estrées (et non pas sur le Danton comme écrit par Denis Seznec).
Il se marie le 20 février 1915 à Porspoder avec Michelle Uguen.
Dont il aura deux enfants :
- Juliette Le Her née le 25 janvier 1917 à Brest.
- François Le Her né le 1er mai 1918 à Porspoder.
Renvoyé dans ses foyers : 19 novembre 1917.
8 décembre 1918 : Réformé n° 2.
Lire à ce sujet l'article de Seznek in "L'affaire Seznec revisitée" :
15 décembre 1918/18 mars 1919 : Maison d'Arrêt de Brest (viol).
A la fin de la guerre, il monte un petit atelier au lieu dit Le Dreff "débitant et sellier"...
Et très vite, construit juste à côté un genre de café/bobinard.
Mais...
Un incendie...
[On le connaît ce refrain-là !]
Dépêche de Brest du 5 mars 1920
Escroquerie (???) de 25.000 €...
1 franc 1920 = 0,98225 €.
"Je ripe les galoches juste après qu'un providentiel incendie eut dévasté le bel édifice - bien entendu vide de tout occupant lors du sinistre.
A la tête du sympathique pécule constitué du remboursement de l'assurance du claque encore fumant, ma petite famille met le cap au sud et porte ses pénates à Pont-Croix, non loin d'Audierne. Là, au moins, on n'a pas encore entendu parler de moi"
in Kériel en page 95.
Il va s'établir ensuite sellier/tanneur/bourrelier à Pont-Croix (21/23 ?).
1923/1924 : déposition procès Guillaume Seznec.
Il habite alors 11 rue de la Smala, Paris 15e (actuelle rue Béatrix Dussane)
.
Le 21 janvier 1924, l'inspecteur de police mobile, Mathey est en charge de procéder à une enquête sur François Le Her :
Ouest-Éclair 30 octobre 1924, pour appuyer l'hypothèse d'un témoignage acheté.
"Il est de toute évidence qu'il s'agissait bien du Receveur de tramways LE HER François Marie qui, à cette époque, demeurait 13 rue Fallempin et qui portait à sa casquette, le N° Matricule 10720 indiqué sur la main-courante."
En 1931....
Le Her habite 20, rue des Quatre Frères Peignot, Paris 15e.
Il était employé de banque (???)
Le 30 avril 1933, le père Yves Le Her meurt.
Sa femme Michelle meurt dans des circonstances bizarres le 12 juin 1933...
En juin 1933, François Le Her a 41 ans (23 juillet 1892) alors que Jeanne Seznec n'a pas encore 21 ans (8 novembre 1912).
Le 18 janvier 1935, François Le Her épouse Jeanne Seznec au Plessis-Robison.
Il avait reconnu précédemment Jean-Claude, né le 6 octobre 1934.
En 1936...
Au Plessis-Robinson...
C'est la véritable smala...
Il héberge sa mère Le Her Yvonne et Pierre et Michel (???)
Il n'a pas l'air doué l'employé du recensement : Jeanne Le Her née au Sénégal au lieu de Saint-Ségal !!!
Michel est-il en fait Jean-Claude né en 1934 (?)
Sa mère Yvonne est morte à Plourin le 19 mars 1946.
Et non en 1937 comme l'a affirmé Jeanne Le Her lors de sa déposition auprès du juge Sultana le 11 octobre 1948.
Plessis-Robinson. Recensement 1936.
En février 1936...
Ils vendent leur commerce de B.O.F.
De quoi vivent-ils après ????
10 janvier 1937 : Naissance de Francette Le Her.
Fin 1937 / juillet 1939 : Clamart, 73, rue Marie Fichet.
Le 1er novembre 1938...
Jean-René Le Her tue son épouse et son beau-père.
De juillet à septembre 1939 :
"Nous nous sommes installés dans un pavillon que mon mari avait fait construire au 93, rue du Pavé-Blanc à Clamart." Jeanne Le Her in Keriel.
En septembre 1939, Le Her, femme et enfants s'installent à Kergleuchard (Plourin-Ploudalmézeau)
"A la déclaration de la guerre, Le Her et sa famille viennent s’installer à Plourin-Ploudalmèzeau, dans une petite maison qui appartient à la famille de François : la ferme de Kergleuchard.
À Kergleuchard il y avait 3 familles, ce hameau était composé de 3 fermes ou bâtisses.
En 1931, c'était les parents de Le Her qui y habitaient.
En 1933 le père casse sa pipe.
En 1936, c'est un des ses frères, Jean-René Le Her né en 1902, sa femme et leurs 3 mômes qui s'y sont installés.
Jean-René a déjà été condamné pour atteinte aux bonnes mœurs, il est brutal, dangereux et alcoolique.
Le 30 octobre 1938, sa femme va se réfugier chez ses parents en raison des mauvais traitements que son mari lui fait subir.
Le 1er novembre 1938, passablement éméché, il débarque chez ses beaux-parents âgés de 82 et 70 ans, entre chez eux en cassant des carreaux, tabasse sa belle-mère, tue son épouse d'une quinzaine de coups de poinçon de sellier, en distribue 8 coups à son beau-père, blesse un voisin avec la même arme, se bat avec les gendarmes avant d'être menotté puis incarcéré à la prison de Quimper où il se pend en avril 1939. (Cf Dépêche de Brest des 2 et 3 novembre 1938 et du 29 avril 1939)
Le beau-père succombera le 4 février 1939.
Les voisins ont du l'avoir mauvaise quand ils ont vu débarquer le couple Le Her - Seznec !"
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Pourquoi je vous raconte tout ça ???
Parce que je suis intimement persuadée que les Seznec ont acheté son témoignage à François Le Her.
C'est d'ailleurs pour cela que Me Alizon a fait défiler tout un tas de témoins contre Le Her :
La DPB du 3 Novembre 1924
On va avoir à la barre :
- Kersaudy, le maire de Pont-Croix,
- Le Page Tanneur à Quimper :
-MM. Boudoux et Goasguen de Pont-Croix :
- Témoignages Hubert, Poupon et Fravallo :
- Témoignage M. Darcillon de Pont-Croix :
Ouest-Eclair du 3 novembre 1924
Menteur un jour... Menteur toujours.
Ses nombreuses adresses montrent son instabilité :
- Kergleuchard,
- Porspoder,
- Pont-Croix,
- Paris 15e, 11, rue de la Smala,
- Paris 15e, 13 rue Fallempin,
- Paris 15e, 20, rue des Quatre Frères Peignot,
- Le Plessis-Robinson, rue Maurice Payret-Dorteil,
- Clamart, 73, rue Marie Fichet,
- Clamart, 93, rue du Pavé Blanc,
- Kergleuchard.
Il a eu 36 métiers, 36 misères...
Et l'affaire Seznec, n'était-ce pas l'occase rêvée de se faire facilement du pognon !
Le Petit Parisien du 3 juillet 1923
D'où le chantage à sa femme Jeanne "Si tu ne fais pas ce que je te dis de faire, je balance ton père à la justice en avouant que j'ai menti lors de son procès..."
Je laisse la conclusion à Michel Kériel en pages 101/102 :
"A peine ai-je fini de déposer que tous ces olibrius me tombent dessus à bras raccourci... et escroc par ci... et menteur par là... et voleur... et usurpateur... et j'en passe et des meilleures.
Il faut bien reconnaître qu'il y a un léger fond de vrai dans tout ce qu'ils racontent."
Liliane Langellier
Thierry Lefebvre...
"Rien ne résiste à un acharnement de fourmi." Victor Hugo / Les Travailleurs de la mer (Propriété Archives du Finistère) Paris, le 16 février 1924... L'inspecteur de Police Mobile BONNY à Mo...
Lire aussi sur ce blog...
Qui ? 26 octobre 1948
P.S. Lire sur ce blog mes trois articles sur François Le Her.
Et mes 4 articles Le Her sur mon blog La Piste de Lormaye.