Le blog de Liliane Langellier. Premier blog sur l'affaire Seznec. Plus de 1.400 articles.
30 Avril 2018
Mon père, ce héros au sourire si doux.
Parcourait à cheval, le soir d'une bataille,
Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.
Victor Hugo. La Légende des siècles.
C'est son anniversaire aujourd'hui....
1878 / 2018 = 140 ans !
1/ La naissance
Il est né le 1er Mai 1878 à Plomodiern.
Marie-Anne Colin, sa mère, cultivatrice est âgée de 28 ans.
Elle est née le 12 Février 1850 à Plomodiern.
Yves Seznec, son père, cultivateur, est âgé de 28 ans.
Il est né le 20 Avril 1850 à Plomodiern.
Ils se sont mariés le 15 Septembre 1869 à Plomodiern.
Il est leur quatrième enfant.
Après Marie, Marie-Anne et Hervé.
Guillaume est immédiatement baptisé.
2/ L'enfance
Là, on cherche déjà à faire pleurer Margot... Mais, de nos jours, les "Margot" ne pleurent pas comme ça. Elles filent vérifier les dires des beaux parleurs avant de mouiller leurs Kleenexs. Les archives, c'est fait pour ça, éviter les menteries en tous genres !
Guillaume Seznec est loin d'être "d'une origine modeste". Voilà comment apparaissent les habitants de la ferme de Kernéol sur le recensement de 1881 :
En 1881, Guillaume a trois ans.
Et deux grandes soeurs : Marie (9 ans) et Marianne (6 ans).
Son frère, Hervé, né en 1877, décède en décembre 1884.
Une fois de plus, chez les Seznec, on n'appelle pas l'enfant par son prénom réel (Joseph) mais par son prénom usuel.
Hervé et Joseph sont une seule et même personne.
Tonton Colin semble habiter avec eux. Et les employés (si je compare avec la ferme Quemin de Lormaye qui était déjà riche) sont nombreux.
Trois ans plus tard, en janvier 1884, Yves Seznec meurt.
Inutile de vous dire que dans une ferme, c'est la naissance d'un mâle qui compte. Et d'un seul si possible pour la succession. J'ai vu, de mes yeux vu, ici, en Beauce, un agriculteur pleurer parce que son fils venait de lui donner un second petit-fils "Ben c'est comment qu'on va-t-y faire pour partager les terres ?" Faut toujours gérer les priorités, pas vrai ?
En page 71 de son ouvrage, Denis Seznec écrit :
"Après l'école primaire, où il fut un élève médiocre, surtout en orthographe, la relative aisance de sa famille lui avait permis de fréquenter le petit séminaire du collège de Pont-Croix, avec en point de mire l'idée de deveni prêtre. Dans cette Bretagne-là, pour sortir de la glèbe de la ferme, il n'y avait pas trente-six solutions : faire curé, marin ou à la rigueur fonctionnaire. Si l'on voulait bâtir fortune, mieux valait s'expatrier."
Une maman veuve et deux soeurs aînées, pas besoin d'avoir un Master en Psycho pour se douter que le gars Guillaume il a dû être plus que chouchouté.
Les garçons élevés par des femmes et trop entourés de femmes dans leur enfance sont rarement des "gagneurs". Mais ils savent jouer de l'affect comme d'autres jouent du pipeau (Oui, mon paternel était un cas d'école !)
C'est chicos quand même le petit séminaire de Pont-Croix. Et réservé aux bonnes familles. Tous ne pensent pas que leur rejeton va devenir prêtre, mais surtout qu'il va avoir une excellente éducation en latin notamment, et devenir un jour avocat, pharmacien, enfin... tout métier qui demande du latin !
Séminaire de Pont-Croix
Là, on s'arrête deux minutes.
Sur le petit séminaire de Pont-Croix.
Il ne faut pas confondre le petit séminaire et le grand séminaire.
La plupart des familles aisées ont envoyé, à cette époque, leurs fils au petit séminaire.
Car l'enseignement y est meilleur. Et plus pointu.
Sans aucun doute, ce genre d'établissement fournissait un lieu de recrutement pour l'Eglise. Mais ce n'était pas sa vocation première.
"En France, le séminaire proprement dit est appelé Grand séminaire. Par opposition, le Petit séminaire est une école de niveau secondaire (collège, lycée) qui forme aussi bien des futurs séminaristes du grand séminaire que des élèves qui resteront laïcs. Le terme et l'institution sont désuets en Europe, mais le petit séminaire a eu une grande importance sociale jusqu'au milieu du vingtième siècle. C'était souvent l'un des seuls moyens de s'instruire pour les enfants intellectuellement doués vivant à la campagne, que les curés de paroisse repéraient et dont l'Église prenait en charge les années d'études secondaires, en proposant aux meilleurs d'accéder au grand séminaire. C'est aussi au petit séminaire que la petite bourgeoisie catholique envoyait de préférence ses garçons pour qu'ils reçoivent une éducation classique de qualité dans un milieu moralement exigeant. L'internat était la règle et la discipline rigoureuse."
In Wikipedia.
Et voilà qu'on nous apprend qu'à 16 ans, Guillaume se fait tourner la tête par une lavandière. Et en quitte Pont-Croix. Je ne suis pas du tout certaine de la cause à effet.
Dans son bouquin, Momo Privat, entre deux poèmes et trois leçons d'histoire, nous siffle un couplet sur l'enfance de Guillaume qui n'est pas piqué des hannetons (page 24) :
"Guillaume Seznec est représentatif de cette race énergique. Il s'isolait dans ses songes, dès l'enfance joyeuse. Surtout quand son père fut trépassé. Il écoutait les coureurs d'aventures qui avaient rencontré, entre les îles et la terre, la barque vide et pourtant chargée au ras des flots, d'une cargaison d'âmes transportée vers d'autres séjours. Il tremblait d'anxiété quand on évoquait l'enfer breton, le Yeun Elez, funèbre marais dans un pays triste, d'une nudité maigre et désolée, où paissent de rares moutons. Il est proche de la route, entre Carhaix, patrie de la Tour d'Auvergne, et Landerneau dont la lune est aussi célèbre que le théâtre. Là sont condamnées à barbotter les âmes mauvaises et celles dont les exorcistes délivrent leurs ouailles, sous la forme d'un chien noir dont les pattes ne marquent pas la poussière du chemin."
"Mais le travail de la terre ne passionne pas le jeune Guillaume. Ce qu'il aime, c'est la mécanique : monter, démonter des pièces, assembler des rouages, bricoler." in Seznec page 72.
En trois mots : un gamin couvé, un élève médiocre et un futur fermier fainéant. Surtout un ado qui ne fait QUE ce qu'il aime. Sans aucune contrainte.
Heureusement pour ces gamins trop couvés, il y avait.... Le service militaire. Et Guillaume n'y coupera pas. Même s'il ne tire qu'un an (septembre 1899/septembre 1900) comme soutien (?) de famille.
R.M.Registre Matricule de Guillaume Seznec.
Là, vous pouvez lire sa description. il mesure 1 m 72. Il est brun. Il a les yeux gris.
Il est dispensé selon l'article 21 (unique de veuve).
Ce que ce documentme révèle, c'est que "Joseph Marie" Seznec, N° 69 de tirage dans le canton de Châteaulin, est arrivé au Corps le 14 septembre 1899. Et qu'il a été envoyé dans la disponibilité le 22 septembre 1900. Avec un certificat de bonne conduite.
En tant que fils unique de veuve, Guillaume n'effectue qu'une année de service militaire.
Il passe dans la réserve de l'armée active le 1er novembre 1902.
3. Le jeune adulte
Mais revenons à la ferme.
Voilà que la soeur aînée se marie avec un certain Gadal.
Qui tanne Marie-Anne Colin-Seznec pour que le partage soit fait.
"En 1904, tu avais vingt-six ans, ta mère a pensé qu'il était temps de passer la main. Marianne et le beau-frère Gadal la tannaient pour qu'elle partage la propriété. Elle s'est laissé fléchir et a convoqué le notaire pour une donation. On a divisé en trois parts (ndlr la soeur aînée, Marie, est morte en 1896). Le beau-frère a fait une affaire. Il a eu la ferme de Kernéol et le moulin. Toi, moyennant une indemnité, tu t'es contenté d'une petite ferme éloignée. Ta mère a eu pour le restant de sa vie les revenus de la troisième ferme du domaine."
in Denis Langlois en page 11.
Et oui, c'est curieux que le gendre soit ainsi préféré au fisset.
Mais le fisset, côté mener une ferme, c'était pas son truc, alors....
Quand il ne tourne pas les feuilles des catalogues de machines agricoles, Guillaume va aider, à droite à gauche, à réparer les machines. C'est justement en réparant la mécanique chez un meunier qu'il fait connaissance d'un grainetier. Mais surtout de la fille du grainetier : Marie-Jeanne Marc.
S'ensuit toute une fable avec un certain Théodore Picard (histoire piquée chez Momo Privat avec les risques encourus) qui, fou amoureux de Marie-Jeanne, aurait eu du mal à laisser la place.
Ce n'est pas la première fable de notre histoire. Ce ne sera pas la dernière non plus.
Enfin, Guillaume et Marie-Jeanne se marient le 18 juillet 1906.
Et comme ils s'aimaient, on est content pour eux.
Liliane Langellier
P.S. Les documents reproduits ci-dessous sont des documents personnels.
Merci de me demander mon autorisation si vous souhaitez les reproduire.
P.S. 2 Merci à toutes et à tous pour les 4.359 visiteurs et les 13.255 pages vues en Avril 💪
💋
💪
💋
💪
💋
P.S. 3 Je rappelle que les travaux des généalogistes amateurs sur Geneanet peuvent être sujets à caution.
C'est ainsi que j'avais trouvé les 4 enfants de Petit Guillaume attribués à Juliette Le Her !
P.S. 4 Pour le prénom de Guillaume, il l'explique lui-même à Vidal (in Le Journal du 8 Juillet 1923)
P.S. 5 Clin d'oeil à l'ami Baudry qui nous a quittés trop tôt.