2 Juin 2023
Nulle raison ne pourrait justifier le mensonge.
Anton Tchekhov / Lettre - 2 janvier 1900
Chez Denis Seznec, en page 106, quelques lignes :
« Le maître de scierie vaque donc à ses affaires tout tranquillement. Le 1er juin, il prend le train pour Paris afin de s'entretenir avec un avocat, Me Gautier, qui doit le défendre dans cette affaire de diffamation dont l'accuse un huissier. Il profite de l'occasion pour se rendre à l'Hôtel de Normandie, en face de la gare Saint-Lazare, où Quemeneur descend habituellement. A la réception, on lui apprend que le conseiller général n'est pas là et qu'il n'a d'ailleurs pas pris de chambre depuis un certain temps.
Mon grand-père est un peu surpris, mais conclut que Quemeneur, pour une raison quelconque, a sans doute choisi un autre hôtel.
Le 2 juin, il est de retour chez lui à Morlaix. »
Chez Bernez Rouz, nous en apprenons un peu plus long. Voilà donc ce qu'il nous écrit en page 75 :
" Le 1er juin, Seznec repart pour Paris pour consulter Me Gauthier, 51 rue Vivienne au sujet d'un différend avec un avoué de Morlaix, Me Croissant. Il prétend que c'est sa femme qui a trouvé l'adresse dans un journal. Interrogé par l'Ouest-Eclair, l'avocat confirme la visite de Seznec mais indique qu'il n'avait pas vraiment l'intention de lui confier cette affaire. Il est à Paris pour d'autres choses : Je suis arrivé le 2 juin vers 7 h 30 du matin. Je me suis renseigné pour obtenir les adresses des représentants des voitures Cadillac en France, ceci dans le but d'acheter des coussinets. J'ai acheté quatre charnières à la maison "Mestre et Blatzé" avenue de la grande armée." (in déposition de Guillaume Seznec, le 28 juin 1923). L'accusation avance l'idée que le retour de Seznec à Paris n'avait pour but que de toucher le chèque 60 000 francs que Pouliquen destinait à Quéméneur, au bureau de poste n° 3. Le 2 juin effectivement, une personne se présente et réclame le chèque, mais l'employé le lui refuse par erreur.
Le 2 juin Seznec affirme qu'il est passé à l'Hôtel de Normandie où Quéméneur devait descendre, pour avoir des nouvelles de son compagnon de voyage. A l'hôtel, l'enquête révélera qu'on ne connaît ni Quéméneur ni Seznec. Au journaliste Maurice Jan, Seznec déclarera le 27 juin : "Quand j'étais à Paris rue du Maine, j'ai demandé si mon ami Quéméneur y était descendu. On m'a répondu qu'on ne le connaissait pas", le problème c'est que l'Hôtel de Normandie n'est pas avenue du Maine mais rue d'Amsterdam, près de la gare Saint-Lazare. Celui-ci indiquera plus tard qu'il avait demandé en fait dans un café à côté, au bar Ville d'Argentan. Dans ce bar personne ne se souvint avoir vu Seznec.
Les défenseurs de Seznec avancèrent l'idée que c'est le notaire Pouliquen lui-même qui essaya de récupérer son chèque au bureau de poste. Ce point fut vérifié par une perquisition à l'étude de Pont-l'Abbé. Trois actes authentiques furent signés ce jour là, ce qui prouve la présence du notaire dans son étude à cette date.
Le 3 juin au matin, Seznec est de retour à Morlaix."
La maison "Mestre et Blatzé" avenue de la Grande Armée.
Vers 7 heures 15, Guillaume Seznec arrive à Paris, gare Montparnasse.
Il rend visite à l'agent d'affaires Joseph Gautier1, 51 rue Vivienne, afin de recevoir des conseils concernant un procès en cours.
Il dira s'être rendu devant le Grand Hôtel de Normandie, 4 rue d'Amsterdam, et avoir demandé au bar La Ville d'Argentan, à la même adresse, si on y avait vu Pierre Quéméner. Cette démarche ne pourra être vérifiée.
Il dira s'être également rendu aux établissements Mestre et Blatgé, 46 et 48 avenue de la Grande Armée, « la plus importante maison du monde pour fournitures automobiles et vélocipédiques » selon son catalogue.
Dans l'après-midi, un homme se présente par deux fois au bureau de poste du 6 boulevard Malesherbes pour réclamer un pli au nom de Pierre Quéméner. L'employé de poste Alfred Bégué lui répond par erreur que le pli n'est pas encore arrivé2.
Le soir, à la gare Montparnasse, Seznec prend un train de nuit pour rentrer à Morlaix.
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1. Ancien avocat et escroc (voir l'article de Liliane Langellier sur ce personnage), qui propose ses services à 10 francs la consultation dans les petites annonces.
2. Alfred Bégué avait d'abord affirmé que ces demandes avaient eu lieu le samedi précédent, 26 mai, au moment où le pli chargé n'était effectivement pas encore arrivé, Jean Pouliquen ne l'ayant envoyé que dans l'après-midi du 25.
Malgré ce départ un peu mystérieux, je ne m'inquiétais donc pas outre mesure. Mais ma femme1 étant rentrée [de]2 Landerneau le [premier]3 samedi soir de juin, je lui demandais si mon beau-frère était rentré ; elle me répondit que non, qu'il n'avait même pas donné de ses nouvelles, et que ma belle-sœur4 commençait à s'inquiéter.5
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1. Marie-Anne Quéméner, épouse Pouliquen.
2. Source : « à ».
3. Mot omis.
4. Jenny Quéméner.
5. Bernez Rouz, page 99.
Lire aussi sur le blog de SaintOp/ Seznek :
"Au bureau de poste n°3 : Quéméner ? Seznec ?... ou un fantôme ?"
Extraits du cahier de Guillaume Seznec :
Non seulement que les postiers du n°3 avaient tout d’abord dit que la lettre recommandée avait été réclamée le 26 et non le 2, mais ils m’ont été présentés tous les 3 ensemble à la Sûreté générale, mais au lieu de dire qu’ils me connaissaient pour être celui qui avait été réclamer la lettre, ils ont répondu spontanément ensemble : ce n’est pas lui, et même en faisant un drôle de geste et gesticulant fortement la tête. Je n’ai jamais voulu prétendre que j’étais à une autre date que le 2 juin à Paris, car j’ai tout de suite déclaré le motif de mon déplacement et en indiquant Mr Gautier qui pouvait le prouver.
Vers 7 heures 15, Guillaume Seznec arrive à Paris, gare Montparnasse. Il rend visite à l'agent d'affaires Joseph Gautier 1, 51 rue Vivienne, afin de recevoir des conseils concernant un procès...
https://affaire-quemener-seznec.blogspot.com/2013/06/1923-06-02.html
L'article original....
"Voleur un jour, volera toujours." Schopenhauer Son nom n'encombre pas les pages des nombreux livres sur l'affaire... A l'exception de Bernez Rouz qui en parle. En sa page 75 : "Le 1er juin, Seznec
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Affaire Seznec : le samedi 2 juin 1923. - La Petite Journaliste de Seznec
L'habitude de fouiller, épier, épiloguer, surveiller est la joie des désœuvrés. Henri-Frédéric Amiel (Journal intime, le 1er janvier 1879.) Rien de bien original à ajouter... Sur ce que j'a...
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