20 Mai 2022
Il lui fallut enjamber un ruisseau noir, une mare lâchée par la teinturerie, fumant et s'ouvrant un lit boueux dans la blancheur de la neige. C'était une eau couleur de ses pensées.
Emile Zola. L'assommoir.
Reprenons...
Depuis le tout début...
Marie-Jeanne Seznec se vante d'avoir accumulé 4.040 dollars or...
Rien qu'en blanchissant le linge des Sammies...
In La Dépêche de Brest du 29 juin 1923
Elle avait ouvert sa blanchisserie brestoise le 20 janvier 1915 :
Non sans exaspérer ses voisins...
Les Américains campent au camp de Pontanezen de novembre 1917 à décembre 1919.
Ils arrivent très exactement le 12 novembre 1917.
"De Novembre 1917 à Novembre 1919 : 800 000 soldats ont débarqué à Brest. Au 1er Novembre 1919 : 1 200 000 ont été rapatriés depuis l'armistice." Patrick Quintin.
Mais la blanchisserie Seznec est revendu à Charles Marc le 13 septembre 1919.
Dépêche de Brest du 23 septembre 1919
in Langlois, en page 16 :
"Les soldats rentrent chez eux. Estropiés, traumatisés. Les plus glorieux, les plus présentables défilent sur les avenues. Charles Marc, le frère de Marie-Jeanne, revient à peu près intact, mais il n'a pas de travail. Il demande à son beau-frère de lui vendre la blanchisserie de Brest. Vendre est un bien grand mot. Il n'a pas un sou et signe des traites pour 25 000 francs. En 1921, la blanchisserie brûle et, comme elle n'a pas été payée, c'est Seznec qui doit percevoir les indemnités."
Seznec ne vend que le fonds de commerce et garde les murs.
Ouest-Eclair du 19 juillet 1923
Ne pas oublier que les Seznec n'étaient pas les seuls à blanchir le linge des Ricains :
« Règne soudain une incroyable prospérité. Les femmes lavent le linge des officiers qui paient bien. Elles livrent les chemises dans de grandes feuilles de papier blanc fournies par l’administration du camp. » in Azraelle 29.
Sur le blog de L'Affaire Seznec revisitée :
"Si l’on considère que le couple Seznec a travaillé pour le corps américain pendant 1 an 1/2, la somme mise de côté correspond environ au chiffre d’affaires dégagé par la blanchisserie pour la même période"
Le chiffre d'affaires de la blanchisserie en 1918 est donc de 60.000 Francs.
Une année et demie = 90.000 Francs.
C'est un chiffre d'affaires et non un bénéfice.
De ce chiffre d'affaires, il faut ôter les différentes dépenses nécessaires à la bonne marche de la blanchisserie : salaires des employés, battoirs, brosses, fers à repasser, savon, lessive, eau, eau de javel, gaz, électricité, charbon, les différentes taxes, les impôts, etc...
On n'est pas loin de la Gervaise de Zola...
"Le lavoir
Un grand hangar, monté sur piliers de fonte, à plafond plat, dont
les poutres sont apparentes. Fenêtres larges et claires. En entrant,
à gauche, le bureau, où se tient la dame ; petit cabinet vitré, avec
tablette encombrée de registres et de papiers. Derrière les vitres,
pains de savon, battoirs, brosses, bleu, etc. A gauche est le cuvier
pour la lessive, un vaste chaudron de cuivre à ras de terre, avec
un couvercle qui descend, grâce à une mécanique. A côté est
l’essoreuse, des cylindres dans lesquels on met un paquet de
linge, qui y sont pressés fortement, par une machine à vapeur. Le
réservoir d’eau chaude est là. La machine est au fond, elle
fonctionne tout le jour, dans le bruit du lavoir ; son volant ; on voit
le pied rond et énorme de la cheminée, dans le coin. Enfin, un
escalier conduit au séchoir, au-dessus du lavoir, une vaste salle
fermée sur les deux côtés par des persiennes à petites lames ; on
étend le linge sur des fils de laiton.
A l’autre bout du lavoir, sont d’immenses réservoirs de
zinc, ronds. Eau froide.
Le lavoir contient cent huit places.
Voici maintenant de quoi se compose une place. On a, d’un côté,
une boîte placée debout, dans laquelle la laveuse se met debout
pour garantir un peu ses jupes. Devant elle, elle a une planche,
qu’on appelle la batterie et sur laquelle elle bat le linge ; elle a à
côté d’elle un baquet sur pied dans lequel elle met l’eau chaude,
ou l’eau de lessive. Puis derrière, de l’autre côté, la laveuse a un
grand baquet fixé au sol, au-dessus duquel est un robinet d’eau
froide, un robinet libre ; sur le baquet passe une planche étroite où
l’on jette le linge ; au-dessus, il y a deux barres, pour pendre le
linge et l’égoutter. Cet appareil est établi pour rincer. La laveuse a
encore un petit baquet sur pied pour passer au bleu, deux tréteaux
pour placer le linge, et un seau dans lequel elle va chercher l’eau
chaude et l’eau de lessive."
12 novembre 1917 / 13 septembre 1919 : les Seznec n'ont pas eu deux ans pour accumuler leurs soi-disant dollars or.
D'après eux, une somme de 4040 dollars en pièces d'or équivalents à 65.000 Francs de 1923.
Juste, comme par hasard, la somme nécessaire à ajouter aux 35.000 Francs de la promesse de vente, et arriver ainsi à 100.000 francs, la juste valeur de Traou Nez.
Comment, avec un chiffre d'affaires de 90.000 francs, les Seznec ont-ils pu mettre de côté 65.000 Francs ???
Comment ???
Je demande.
Liliane Langellier
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