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Affaire Seznec Investigation

Le blog de Liliane Langellier. Premier blog sur l'affaire Seznec. Plus de 1.100 articles.

Affaire Seznec. Guillaume Seznec mercanti pendant la Première Guerre Mondiale...

On croit mourir pour la patrie, et on crève pour des combines de mercantis, prompts à engraisser, à travers tous les charniers, leurs dividendes. —
(Victor Margueritte, Debout les vivants !, 1932)

En préambule...

Pendant la Première Guerre Mondiale...

Guillaume Seznec n'a jamais été un héros.

Sauf dans l'esprit de sa descendance.

C'était en fait un paresseux et un magouilleur.

Toutes les combines, même les plus louches, lui étaient bonnes pour se faire de l'argent.

Il a été un embusqué et un mercanti.

"Tout homme de négoce, petit ou grand, qui au lieu de se limiter à un gain légitime conçoit le commerce comme une lutte où il s'agit d'acheter le moins cher possible et de vendre aussi cher que le permettent la pénurie des denrées ou l'ignorance des acheteurs, cesse d'être un marchand pour devenir un mercanti."

in Le Progrès civique.

"Un nouveau mot fait son apparition : mercanti. Il qualifie l'intermédiaire parasite, sur les lignes arrière, qui fait monter les prix des denrées alimentaires devenues rares, comme le vin, la charcuterie, le fromage, le beurre. "Que voulez-vous : c'est la vie chère !" s'exclame un mercanti dans une caricature du Crapouillot. "Pour vous, peut-être, moi, je la trouve plutôt à bon marché", répond le poilu. Face au civil enrichi, le soldat se voit comme "le PCDF, le pauvre con du front". Il en veut aussi au villageois bien nourri, au cafetier à la Thénardier, qui monnaie ses services : si le conflit dure, c'est que certains y voient leur intérêt."

in François-Guillaume Lorrain. Le Point du 9 novembre 2011.

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Retour sur la carrière de Guillaume Seznec de 1913 à 1919.

En 1913, il s'associe avec un certain Stutzmann à Brest pour ouvrir une blanchisserie américaine.

Lui aussi, il est fasciné par le mot "américain"...

 

Chez Bernez Rouz en page 53 :

"Installé depuis 1913 à Brest, au 3, rue Amiral-Linois, Seznec ouvre dans un premier temps une fabrique de cols. Il se sépare vite de son associé Sutzmann."

Note 104 de bas de page : 

"Son associé Sutzmann était de conduite et de moralité déplorable, ivrogne invétéré, fréquentant les lieux de plaisir." Renseignements communiqués par le commissaire de police de Brest le 9 janvier 1924.

Médaille d'argent in La Dépêche de Brest du 28 septembre 1913

Petit-Journal 1er juillet 1923 :

"Samedi soir, vers 17 heures, Fernand Stutzmann, 55 ans, employé au P.-O., 47, rue Simon-le-Franc, se présentait à la Sûreté générale pour faire une déclaration au sujet de faits dont il fut la victime de la part de Seznec. À sa sortie de la rue des Saussaies, il nous a déclaré : — En 1913, j'étais établi blanchisseur à Brest, lorsque, un jour, Seznec, qui était propriétaire d'une importante ferme à Roseray, vint me trouver et m'offrit de me commanditer pour une somme de 120.000 fr. " Vous pourrez ainsi, me dit-il, monter un stand à l'exposition de Brest qui va s'ouvrir." Le lendemain, nous nous rendions chez Me Robin, notaire à Brest, afin de dresser l'acte de commandite. Je pris ce stand et en fit tous les frais durant toute l'exposition. Voyant qu'elle tirait à sa fin et que je n'avais touché aucune somme de Seznec, je me rendis chez lui, à la Roseray. Et là, cyniquement, il m'avoua, qu'il n'avait pas un sou et que son bien était hypothéqué pour 150.000 francs. J'étais roulé. Après conseil de Me Feuillard, avocat à Brest, j'intentais un procès contre Seznec devant le tribunal de commerce, procès que j'ai gagné, mais qui m'a complètement ruiné et a incité ma femme à m'abandonner."

Stutzman était en effet marié en premières noces avec une fille Guéguénnou, sœur du mari de Marie Corentine Marc, elle-même sœur de Marie-Jeanne Marc la femme de Seznec.

Seznec se sépare donc de son associé...

Sur les factures de la Maison Seznec, il est alors indiqué "Beurre centrifuge de Quimper, oeufs, fruits et primeurs, vins cidres de toutes provenances, achat et vente de bouteilles et fûts vides."

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Chez Rieux-Nédelec, en page 21 : "En août 1914, Guillaume rejoignit son centre mobilisateur à Brest. Classé dans le service auxiliaire après Quémeneur, il se trouva du côté des "embusqués". Débrouillard, il sut se faire verser au dépôt des vivres de la marine à Landerneau ; une bonne planque, qui lui permettait de s'assurer de confortables avantages au travers de ses déplacements à Brest. Quelques mois plus tard, il achetait un fonds de blanchisserie à Saint-Pierre-Quilbignon."

Effectivement, en 1914, Seznec est mobilisé dans les services auxiliaires au dépôt d'infanterie à Brest.

Il n'a jamais été volontaire pour aller à la poudrerie d'Ouessant, d'une part parce qu'il était basé à Brest, et d'autre part parce qu'il n'y a jamais eu de poudrerie en activité à Ouessant à cette période.

Pendant la guerre, il était blanchisseur pas soldat/gardien de poudrerie.

"Il travaille alors pour l'armée et ouvre, les 20 janvier 1915, une nouvelle blanchisserie à Saint-Pierre Quilbignon au lieu-dit Trémiliau, à l'ouest de Brest, sur la rive droite de la Penfeld. "

In Michel Pierre en page 29.

L'usine de blanchisserie est à Trémilliau, près du cimetière de Recouvrance, le dépôt au 3, rue Amiral Linois.

La Dépêche de Brest du 19 janvier 1915

Six mois plus tard, il ne fait pas l'unanimité dans le quartier :

Le jeudi 21 septembre 1916, Guillaume Seznec était bel et bien à Brest.

Il est catégorisé comme ayant un mauvais caractère :

La Dépêche de Brest 26 septembre 1916

"Jeudi dernier, vers huit heures du soir, M. Noël Floch, 65 ans, retraité, accompagné de sa femme et d'une nièce, regagnait son domicile à Trémilliau, en Saint-Pierre Quilbignon, lorsque soudain il trouva le petit chemin y donnant accès complètement barré par une automobile et de nombreuses planches. Il invita, très poliment, le propriétaire de la voiture, Joseph Seznec, blanchisseur, actuellement soldat au 87e territorial à lui faire place Mais, pour toute réponse, ce dernier injuria grossièrement le sexagénaire ; puis, saisissant une barre de fer, il lui porta un violent coup à la face. M. Noël Floch ne fut fort heureusement que légèrement contusionné. La gendarmerie vient de terminer son enquête sur cette affaire. Le procès-verbal a été transmis au parquet de Brest."

Pollueur et bagarreur, tout pour plaire !!!

Mais aussi de très mauvaise foi :

La Dépêche de Brest du 28 septembre 1916

Côté magouilles...

Seznec vend aussi du savon de qualité inférieure qu'il reçoit de Marseille par wagons complets en gare de Brest.

Coup de chance...

Le 12 novembre 1917, les Américains débarquent alors à Brest et s'installent au camp de Pontanezen.

Guillaume Seznec voit là une occasion rêvée pour étendre encore un peu plus ses petits trafics.

Il obtient le marché du linge du "Camp Hospital 33" du camp américain et la blanchisserie se charge aussi de commandes privées de militaires de l'US Army.

Achat de Traon-Ar-Velin à Morlaix au début de l'année 1918.

Denis Langlois, " Pour en finir avec l'affaire Seznec" en pages 258/259 :

 "Dans son récit d'après-bagne, il décrit par le menu une opération qu'il a réalisée au début de l'année 1918 et à laquelle je n'ai pas prêté suffisamment d'attention. Son régiment d'affectation est transféré de Brest à Morlaix. Seznec blanchit le linge d'une partie des soldats français et américains cantonnés à Brest. Ce transfert est pour lui et pour sa femme, qui est la directrice de la blanchisserie, un sale coup. Le capitaine Bousquet lui suggère une solution : trouver à Morlaix un local et y installer une partie de ses machines.

A Morlaix, à l'entrée de la ville, le long de la rivière Le Queffleuth, Seznec repère une scierie fermée depuis le début de la guerre : Traon-ar-Velin. Le problème, c'est que le propriétaire, Jean-François Castel, ne veut pas vendre. Il attend le retour de ses deux fils mobilisés sur le front pour rouvrir sa scierie. Il veut bien louer jusque-là, mais avec l'interdiction de toucher à l'agencement des lieux et certainement pas de les transformer en blanchisserie.

Avec la complicité du capitaine, Seznec met au point un stratagème assez sordide. Il raconte :

"Le capitaine s'installe au Grand Café de Morlaix à 3 heures avec le commandant du camp. Je viens et je m'assois avec le propriétaire de la scierie le plus près possible de leur table. Dès qu'il me voit le capitaine me demande si j'ai trouvé quelque chose. Je réponds : "Oui, j'ai trouvé une scierie fermée mais le prix du loyer et les conditions sont inacceptables." Alors, le commandant dit : "Mais si c'est fermé, nous allons la réquisitionner !" Comme le propriétaire ne veut pas entendre parler de réquisition, il change d'avis. Il me dit : "Si vous voulez l'acheter, je veux bien vous la vendre." Le prix me convient. Je l'achète donc à 40 000 francs, soit 10 000 en sous-main et 30 000 déclarés au notaire."

S'emparer ainsi de la scierie d'un père de soldats combattant au front, et en plus ne pas la payer totalement - en 1923, il doit encore à Castel 18 000 francs - ne peut qu'être mal vu par les habitants de Morlaix. Pas étonnant que les voisins de Seznec le détestent et témoignent contre lui."

Morlaix. Traon-ar-Velin. De Castel à Seznec. Archive personnelle.

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Pour la figure légendaire du héros de guerre...

Vous repasserez.

Guillaume Seznec ne s'est JAMAIS porté volontaire pour défendre quoique ce soit.

Pas plus à Ouessant qu'ailleurs.

Il a juste profité de la période de la guerre pour s'en mettre plein les fouilles.

C'était un mercanti.

Si quelqu'un veut me prouver le contraire, qu'il peaufine ses arguments.

Les photos du Fort Saint-Michel à Ouessant ne changeront rien à l'affaire.

#onségare

 

Liliane Langellier

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